Celles qui nous survivront dans un milliard d’années…

Des créatures étranges hantaient déjà le fond de nos océans il y a deux milliards d'années...

Nous vous convions à un exercice pratique déroutant.

Elargissant à chaque instant le champ de nos investigations afin de s’approprier un regard différent sur la Nature et sur nous-mêmes (regard que nous définissons dans notre second roman et notre nouvel essai : « Les métamorphoses d’Eros » comme étant une vision holistique du Monde) nous mettrons aujourd’hui en lumière les êtres les plus fascinants qui soient : les bactéries extrêmophiles.

A cet instant, vous devez probablement vous demander si nous n’avons pas brutalement perdu la raison.

Comment pourrait-on s’extasier sur l’existence de certaines bactéries ?

Cette seule interrogation révèle déjà l’étendu des progrès à faire. Partir du principe rigide et sclérosant que des êtres unicellulaires invisibles à l’œil nu sont sans intérêt symbolise en réalité une formidable fermeture au monde.

Laissons donc entrer la lumière…

Une bactérie extrêmophile est un être qui vit dans des conditions qui seraient mortelles pour n’importe quelle autre créature. Ces conditions extrêmes sont, par exemple, des températures supérieures à 100° ou inférieures à 0°, des pressions colossales, des milieux très acides ou exagérément chargés en sel. Ceci peut concerner aussi des milieux très radioactifs ou sans oxygène. Bref des environnements peu recommandables et dans lesquels on ne souhaiterait vraiment pas séjourner trop longtemps.

Pourtant, d’innombrables bactéries vivent dans ces milieux proches de l’Enfer décrit par Dante.

On les trouve dans les glaces de l’Antarctique, dans les eaux de la Mer Morte, dans des gisements pétroliers, dans des cheminées hydrothermales sous-marines. Elles portent souvent des noms empreints d’une réelle poésie surréaliste. On peut citer : Pyrolobus fumarii, Sulfolobus acidocaldarius ou Bacillus infernus.

Ces êtres ont donc développé une résistance exceptionnelle à des conditions de vies totalement inhumaines. Au-delà de l’ « exploit sportif », ceci nous conduit à élargir fantastiquement notre regard sur la problématique de la vie dans l’univers.

En effet, la vie est apparu sur Terre il y a 3,8 milliards d’années dans un environnement atroce : pas d’oxygène, pas d’eau et des coulées d’acide et de soufre un peu partout. Charmant…

Pourtant, ces formes de vie embryonnaire se sont lentement développée bien avant l’explosion du Précambrien il y a 650 millions d’années. L’existence de ces bactéries extrêmophiles à notre époque démontre éloquemment les phénoménales capacités d’adaptation de la Nature.

Ceci ouvre naturellement la porte à toutes les suppositions quant à la possible existence de formes de vies embryonnaires sur Mars et sur certains satellites de Jupiter (on pense immédiatement à Europe), de Saturne, d’Uranus ou de Neptune.

Le climat est probablement plus accueillant dans le sous-sol de Mars ou dans les eaux d’Europe que dans les cheminées hydrothermales qui vomissent une eau sulfurée et brûlante au fond de l’Océan Atlantique !

Le mystère de la Vie conforte encore notre émerveillement. Une fois de plus.

Par ailleurs -et ceci justifie pleinement le titre de cet article- lorsque l’être humain aura disparu en provoquant lui-même la 6eme extinction de masse affectant notre planète, les bactéries extrêmophiles continueront à vivre parfaitement.

Pendant plusieurs milliards d’années encore…

Mais la Nature nous réserve d’autres surprises que des recherches très récentes viennent de mettre en évidence. En effet, des découvertes issues d’un travail géologique dans une carrière de grès près de Franceville, au Gabon, révèlent l’existence de fossiles d’êtres multicellulaires beaucoup plus anciens que prévu. En effet, ces êtres aux formes étranges sont pétrifiés dans des roches vieilles de… plus de deux milliards d’années !

Or les être multicellulaires les plus anciens connus actuellement -que l’on appelle « faune d’Ediacara »- sont âgés de… 650 millions d’années !

En quelques semaines, on vient ainsi de repousser les limites chronologiques de l’émergence de la vie vraiment organisée sur Terre (car ces fossiles font quand même jusqu’à 12 centimètres de diamètre…) dans un rapport de 1 à 3.

Des fossiles qui repoussent très loin dans le temps les origines de la vie sur Terre

Deux hypothèses peuvent être prises en compte ici. Soit cette vie est demeurée linéaire, stable et sans réelle évolution depuis cette lointaine époque jusqu’aux lisières du précambrien (c’est-à-dire une étonnante stabilité pendant 1 milliard 300 millions d’années !!!), soit un ou plusieurs cycles complets de vie existèrent avant la faune d’Ediacara.

Le processus est fascinant car les conditions climatiques étaient extraordinairement différentes des nôtres il y a deux milliards d’années

La Lune était plus proche et les marées étaient gigantesques. Le jour était plus court de plusieurs heures et notre planète tournait beaucoup plus vite sur elle-même. Le soleil était perpétuellement masqué par une atmosphère épaisse, rougeâtre, beaucoup plus dense qu’aujourd’hui et si chargée en gaz carbonique qu’elle tuerait immédiatement toutes les créatures vivant actuellement sur Terre (hormis les poissons abyssaux bien sûr).

Il y a deux milliards d’années, la teneur en oxygène représentait environ 10% seulement du taux actuel. Trop peu pour qu’une barrière d’ozone protège la Terre des UV agressifs du Soleil, mais suffisamment pour que l’oxygène pénètre à 30 à 40 mètres sous la surface des océans… et donc permette l’émergence d’êtres de grande taille au métabolisme élevé.

Cette mise en abyme est fantastique et nous ouvre, une fois de plus, des horizons nouveaux. Des horizons inédits.

Des horizons qui émerveillent l’esprit et font battre le cœur un peu plus fort…