Interview Oksana et Gil dans Mediapart

Un matin différent - Éditions Artalys

Un matin différent – Éditions Artalys

 

Interview paru le 15 Juin 2015 dans Mediapart.

 

Bonjour Gil et Oksana,

 

Vous venez de publier un nouvel ouvrage. Il apparait différent en regard des derniers parus…  Une envie de plonger dans un nouvel univers ?

« Un matin différent » est en effet un roman très différent des autres.

Les intrigues de nos autres récits sont souvent foisonnantes avec de nombreux personnages et des péripéties en cascade. C’était le cas par exemple avec notre quatrième livre : « Tomyris et le labyrinthe de cristal ».

Dans le cas de « Un matin différent » (Éditions Artalys) nous avons souhaité concentrer au maximum l’intrigue afin qu’elle respecte la règle des trois unités imposée par la dramaturgie classique, c’est-à-dire : unité d’action, unité de lieu et unité de temps.

Ici, l’unité d’action est évidente car il s’agit simplement de la naissance de l’amour entre deux personnages, amour qui sera prématurément brisé par la tragédie du 11 Septembre 2001. L’unité de lieu est respectée aussi car tout se passe à New York dans un rayon de 500 mètres autour des tours jumelles du WTC. Enfin, l’intrigue dure moins de deux heures.

Nos univers sont souvent baroques, fantasmagoriques ou poétiques. Dans le cadre présent, nous souhaitions revenir à la description simple et méticuleuse à la fois d’une réalité qui concerne chacun de nous, même si l’issue est ici tout à fait exceptionnelle et dramatique.

 

Comment décririez-vous votre roman pour le lecteur qui aimera surement l’atmosphère qui se dégage à chaque page?

« Un matin différent » s’efforce de mettre en lumière la différence fondamentale qui existe entre le temps ressenti et le temps réel. Dans le cas présent le phénomène est encore accentué car les deux tourtereaux qui viennent de se révéler mutuellement leur amour travaillent au 96eme étage de la tour Nord du WTC. Ils laissent un instant leurs regards errer vers l’extérieur en regardant le ciel de New York derrière les parois de verre de la tour géante. Soudain, la silhouette d’un avion de ligne se découpe devant eux. Il leur reste exactement deux dixièmes de seconde avant d’être pulvérisés dans un fracas de verre et de métal. C’est à cet instant précis que leurs esprits se mettent à chevaucher souvenirs enfouis et folles chimères.

Le temps que nos machines sophistiquées découpent en nanosecondes n’existe plus d’un coup. Ils sont brutalement dans un ailleurs qui n’est plus régi par la cyclicité du temps ni sa flèche qui nous propulse sans cesse vers un destin dont nous ne savons rien. Nos deux héros s’immergent au sein d’une éternité trop vite foudroyée.

 

Que dire des personnages? Eux aussi sont émouvants et forts dans leur réalisation… il y a une vraie dimension qui se trouve à chaque instant, indéfinissable et forte…

William Fitzgerald, l’australien cavaleur, et Iluh Semarang, la balinaise réservée, sont très différents. Totalement différents.

Et c’est justement l’union de ces différences que nous avons souhaité mettre en exergue ici.

De leurs différences naît une lumière chaude, suave et sensuelle, qui les pousse à s’exhausser au-delà d’eux-mêmes. La notion d’ «indéfinissable » est très juste car l’émergence de cet amour entre deux êtres que tout oppose apparemment génère des émotions fortes et troubles à la fois. Elle réveille en nous des sensations, des joies, des plaisirs et des peurs. On a envie de les accompagner un bref moment sur le chemin de la vie. De leurs souhaiter bonne chance.

En même temps, chaque lecteur sait très bien qu’une épouvantable catastrophe va briser net cette belle histoire. Comme elle a simultanément brisé les destins de milliers d’êtres humains si l’on comptabilise les victimes des attentats, leurs familles et leurs proches.

Mais nous souhaitions vraiment tisser une intrigue courte, simple et percutante à la fois. Après l’écrasement du premier avion sur la façade de la tour Nord du WTC, d’innombrables tragédies s’enchaînèrent en ondes de choc successives. Mais celle de nos héros s’achève immédiatement. En un millième de seconde.

C’est la raison pour laquelle le dernier chapitre s’achève si abruptement.

 

Quelle force créative vous a poussé à produire un roman aussi nouveau et aussi captivant? Y a-t-il un fil conducteur, des recettes nouvelles? S’agit d’une histoire qui touche chacun dans un inconscient collectif commun ?

Nous souhaitions évoquer la tragédie du 11 Septembre de manière intimiste et en finissant notre roman là où les commentateurs commencèrent à décrire l’effroi qui tétanisa le monde entier pendant quelques jours. Nos autres romans évoquent souvent les destinées étonnantes de plusieurs personnages, d’une contrée, voire de l’humanité toute entière. Ce fut le cas pour notre second livre : « Katharsis ».

Dans le cas présent, nous avons concentré l’intrigue autour de deux êtres humains en un seul lieu et pendant une seule journée. Nous ne savons pas si c’est une « force créative » qui nous a poussés, mais ce fut un exercice passionnant.

Naturellement, la tragédie du 11 Septembre est inscrite durablement dans l’inconscient collectif. Il en est de même avec le sentiment diffus que l’on revoit toute notre vie juste avant de mourir. Mais nous avons fait ce choix radical en pensant aux deux victimes imaginaires de notre récit. C’est, inconsciemment sans doute, une forme d’hommage aux innocentes victimes de ce drame qui nous fit tous entrer si violemment dans ce XXIe siècle qui risque fort d’être le plus cruel de tous…

Dans « Fureur et mystère » (Les feuillets d’Hypnos), René Char précisait que « l’homme est capable de faire ce qu’il est incapable d’imaginer ». Cette remarque d’une effrayante lucidité est toujours d’actualité…

New York 11 Septembre 2001

New York 11 Septembre 2001

 

Un prochain ouvrage? De prochaines dates de présentation du roman?

Nous avons déjà écrit trois nouveaux romans.

Le sixième : « Zalmoxis » est un pur récit de SF qui paraîtra en 2016 aux Éditions Rivière Blanche. C’est en fait une suite de « Katharsis », mais plus de quatre siècles après la disparition de l’humanité suite à un impitoyable « hiver volcanique » qui pétrifia la surface de la Terre dans la neige et la glace.

Ce roman sera suivi par « Nyx et Thanatos » et « Le testament de la lumière ».

Le septième : « À la verticale de l’Enfer » est un roman fantastique qui se passe dans un manoir isolé en Ardèche. Ce roman est tiré d’un scénario que nous avions écrit pour Joël Houssin (le créateur de la série Dobermann) dans le cadre d’une série TV dont il avait imaginé le concept. Cette série restant pour l’instant à l’état de projet, Joël nous a donné son accord pour que nous puissions transformer ce scénario en roman. C’est l’histoire tragique de trois familles et d’une vengeance qui se poursuit de génération en génération. L’épilogue est… déroutant !

Le huitième et plus récent roman : « L’Hydre-Univers » sera assurément le plus surprenant de tous. Partant d’une intrigue classique pour un thriller (une prise d’otages en Amazonie avec demande de rançon) ce récit qui ne ressemble à aucun autre répond de manière totalement iconoclaste à la question suivante : « que se passe-t-il dans le cerveau d’un homme qui vient d’être décapité ? »

La réponse est hallucinante et entraînera les lecteurs dans l’univers le plus exotique et lointain qui soit : le cerveau d’un homme…

Ce roman bénéficiera d’une postface coécrite par deux des plus prestigieux écrivains dans les domaines de l’imaginaire : Yal Ayerdhal et Jean-Claude Dunyach qui ont glané tous les deux un grand nombre de prix littéraires (Grand Prix de l’Imaginaire, Prix Bob-Morane et Prix Rosny aîné par exemple).

Deux gros éditeurs sont déjà intéressés.

Par ailleurs, nous dédicacerons « Un matin différent » le samedi 20 Juin dans le magasin Cultura d’Hénin-Beaumont, près de Lille.

 

Lien : http://blogs.mediapart.fr/blog/le-blog-des-associes-par-yannick-et-helene/140615/un-matin-different-par-oksana-et-gil-prou

 

Pour commander le livre en version papier (la version numérique est disponible partout) :

http://editions-artalys.com/hors-reel/un-matin-different/

Zalmoxis

Zalmoxis

À la verticale de l'Enfer

À la verticale de l’Enfer

L'Hydre-Univers

L’Hydre-Univers

Interview Oksana et Gil pour Mediapart

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Interview par Yannick Comenge et Hélène Loublier

 

Bonjour Oksana, Bonjour Gil,

Quatre mains pour écrire des livres et décrire des univers. C’est rare et cela marche bien. Quel est votre dernier ouvrage et quel en sont les premiers ressorts de l’intrigue ?

Oksana et Gil. Notre dernier livre est un essai : « Les métamorphoses d’Eros » paru aux Editions de La Hutte en novembre 2011. Les deux prochains romans seront publiés en 2013. Le premier : « Tomyris et le labyrinthe de cristal » est un récit d’heroïc fantasy historique. L’intrigue se déroule en 529 av J .C. Elle met en lumière la résistance de la reine Tomyris et de son peuple : les Massagètes, face aux désirs d’hégémonie de Cyrus le Grand et des troupes Perses. Une atmosphère fantastique relaie progressivement la sauvagerie de l’histoire décrite par Hérodote. La fin est totalement onirique. Le second roman : « Zalmoxis » est le premier volet d’une trilogie. C’est un pur récit de science-fiction qui mêle les destinées des survivants de l’humanité après le cataclysmique « hiver volcanique » qui a progressivement pétrifié la Terre et notre civilisation sous des monceaux de glaces. Profondément enfouis dans l’écorce terrestre, ou vivant au large de Jupiter en symbiose avec plusieurs civilisations extraterrestres, nos lointains descendants sont condamnés à vivre ensemble face à la menace d’invasion des redoutables occupants de la Galaxie noire.

Pour vous, quel est in fine la motivation de cet œuvre que vous créez à deux ? Quels sont vos modes d’écriture… et d’inspirations ?

Oksana. Ce qui caractérise notre duo est le mélange d’univers différents. Dans notre société, tout est devenu lisse, codé, structuré. Nous avons la volonté de casser les clichés et de surprendre. Notre essai : « Les Métamorphoses d’Eros » reprend d’ailleurs cette idée de complémentarité et de créativité que nous traduisons ainsi : remplacer le principe de domination par celui d’association. La motivation qui nous conduit à écrire c’est la vie et sa complexité : les rapports humains, l’amour, l’altruisme, l’imaginaire et le réel… Par ailleurs, nous utilisons beaucoup les médias, documentaires et journaux télévisés qui nous permettent d’enrichir nos réflexions. On apprend beaucoup de l’observation des peuples, des cultures et de leurs différences qui, pour nous, est source de diversités et non de conflits potentiels.

Gil. Ecrire à deux alimente d’infinies richesses car chaque idée est passée au crible de nos imaginations respectives. Notre objectif est simple : chaque synthèse doit être positive et chaque divergence d’approche (car cela nous arrive souvent…) doit être féconde d’idées et de péripéties nouvelles. Travaillant ainsi, nos différences nous enrichissent vraiment et nous incluons régulièrement deux univers différents en un seul. Nous élaborons d’abord une trame commune, puis chacun travaille de son côté. Les éléments spécifiquement humains sont le plus souvent sous la responsabilité d’Oksana et les éléments matériels m’incombent. Mais nous inversons régulièrement les rôles ! Notre inspiration se situe ainsi à la confluence de tous nos centres d’intérêts : cosmologie, observation de la Nature, histoire des civilisations antiques. Dans nos vies, comme dans nos récits, nous nous efforçons d’expérimenter tout ce qui diversifie et enrichie l’existence. On peut trouver de la magie et du beau en chaque chose. Il suffit de bien regarder et d’y mettre un peu du sien.

Vous développez également des valeurs dans votre univers… il y a une véritable histoire dans chacun des ouvrages aussi pensez-vous que cela puisse être adapté ?

Oksana et Gil.

Ces valeurs tournent presque toutes autour d’un élément qui nous semble capital : la curiosité. Savoir s’émerveiller est une qualité qui ennoblit la vie et apporte d’immenses satisfactions. Si nous parvenons à accroître cet appétit de découverte et le réel bonheur qui découle de cette quête permanente chez une partie de nos lecteurs, nous serons totalement satisfaits ! Plusieurs commentateurs ont effectivement précisé que nos deux premiers romans : « Cathédrales de brume » et « Katharsis », se caractérisent par le caractère « cinématographique » de leurs intrigues. Il en sera de même avec « Tomyris et le labyrinthe de cristal » et « Zalmoxis ». Naturellement, ces histoires pourraient être adaptées au cinéma.


Quels sont aujourd’hui vos ambitions d’écriture ? et quel est votre rapport à l’écriture ? Un moyen de sublimer le réel et des aspirations vers le meilleur ? tout simplement un art que vous aimez depuis toujours ?

Oksana. Ce que nous essayons de transmettre à nos lecteurs est une part de rêve mélangée à la réalité. Si les hommes réussissaient à mettre à profit leurs qualités intellectuelles et sensorielles, cela aboutirait à de nombreux progrès dans tous les domaines. Il faudrait peut-être que l’homme commence par croire en lui et être parfois capable de braver les interdits. Outre le plaisir d’écrire, qui est déjà une grande satisfaction en soi, nous espérons séduire notre public et le faire réagir. L’écriture existe depuis toujours. D’une manière ou d’une autre, l’Homme a besoin de partager des idées pour évoluer.

Gil. Notre ambition est de prendre du plaisir en écrivant des histoires où nous glissons, parfois, une partie de nous-mêmes. Si nous parvenons à partager réellement ce plaisir avec nos lecteurs, l’alchimie sera alors totale. Cependant, cette ambition n’a rien d’originale, mais elle nous comble. Pour nous, écrire est un plaisir mêlant différentes facettes distinctes qui s’unissent. Le fantastique et la science-fiction s’efforcent fréquemment de sublimer le réel en oubliant passagèrement la lie du quotidien. Dans notre cas, inventer des histoires, propulser des personnages au sein d’univers baroques et tenter de dire l’indicible, est tout simplement une satisfaction intense, presque une volupté. Et c’est déjà beaucoup…

Les lecteurs peuvent ils vous retrouver pour des séances prochaines de dédicace ou de lecture dans des cafés littéraires ou autres ?

Oksana. La prochaine séance aura lieu à Lille en librairie avec peut-être une présentation à l’université dans un amphithéâtre.

Interview d’Oksana et Gil réalisée par Yannick Comenge et Hélène Loublier

Lien : http://blogs.mediapart.fr/blog/yannick-comenge/280812/interview-doksana-et-gil-pour-les-metamorphoses-deros